Cela fait un moment que je n’ai rien publié ici, et pour repartir j’ai envie de vous partir d’une artiste que j’affectionne beaucoup et dont j’ai découvert la production il y a quelques années via les collections du musée de La Roche-sur-Yon. Je veux parler d’Ellen Kooi, photographe néerlandaise née en 1962 dont l’œuvre strictement mise en scène est souvent qualifiée de « surréaliste ».
Silencieuse, la production photographique d’Ellen Kooi est empreinte d’une tension extrême associée à une pudeur presque irréelle qui n’est pas sans rappeler certaines caractéristiques traditionnelles de la population des Pays-Bas. Il y a une distance presque craintive du spectateur et pourtant une proximité créée par une pureté de l’image qui crée le sentiment de réalité. Cela est d’autant plus vrai qu’Ellen Kooi va chercher dans des motifs que nous connaissons de près ou de loin pour susciter l’émotion. En effet, comme au cinéma et régulièrement dans la photographie plasticienne, Ellen Kooi travaille avec le principe du story-board qui permet de ne rien laisser au hasard et aussi de convoquer des éléments spécifiques à d’autres formes artistiques.
Ellen Kooi, Bergen – Dunhuis, 2009. Courtesy Galerie Les Filles du Calvaire
En regardant Bergen Dunhuis, il est possible d’identifier des éléments picturaux comme le travail d’Edward Hopper dans la maison perchée sur la dune ou encore le ciel tourmenté et l’horizon lointain qui rappellent la peinture paysagère flamande du XVIIe siècle. Mais au-delà, les deux personnages (regardez bien l’ombre dans les herbes à droite) n’expriment aucune émotion directe, sinon via l’oiseau marin tenu par le cou dans la main au premier plan.
Par la contemplation, je suis tenté d’imaginer comme seuls bruits celui du sac et du ressac des vagues au loin, ainsi que celui du frottement rêche des herbes sous l’effet du vent. Une atmosphère perturbante et tendue (associée à un format large et un cadrage profond en contre-plongée ou au niveau du sol) qui est souvent comparée au cinéma Hitchcockien.
La photographie d’Ellen Kooi m’apparait comme pouvant être une représentation de rêves, mais également une mise en image d’angoisses ou d’émotions joyeuses. Les interprétations psychanalytiques et philosophique peuvent être variées tant l’œuvre est évolutive au fil du temps, mais le ressenti du cœur inhérent à chacun est là aussi l’aspect principal de l’appropriation.
Exposition personnelle à voir du 7 mars au 6 juin 2015 à la Roche-sur-Yon.
Site internet de l’artiste : http://www.ellenkooi.nl/
Site de la Galerie Les Filles du Calvaire : http://www.fillesducalvaire.com/
Ellen Kooi, Amsterdam – dogs, 2005. Courtesy Galerie Les Filles du Calvaire
Ellen Kooi, Halfweg – Forest Edge, 2013. Courtesy Galerie Les Filles du Calvaire
Ellen Kooi, De Houtwielen – ballonnen, 1997. Courtesy Galerie Les Filles du Calvaire